- comble
- comble 1.(kon-bl') s. m.1° Ce qui tient au-dessus des bords d'une mesure déjà pleine. Le comble d'un boisseau.2° Fig. Le dernier degré, le plus haut point.• Cette ombre de pitié n'est qu'un comble d'envie ; Vous m'avez envié le bonheur de ma vie, CORN. Oedipe, III, 3.• S'il ne m'obéit point, quel comble à mon ennui !, CORN. Cid, II, 3.• La mort n'est point pour moi le comble des disgrâces, RAC. Baj. II, 3.• Sans doute, c'est pour moi le comble des malheurs, RAC. Mithr. II, 6.• Que le trouble [dans une pièce de théâtre], toujours croissant de scène en scène, à son comble arrivé se débrouille sans peine, BOILEAU Art p. III.• Lorsque les abominations de Sodome furent montées à leur comble, MASS. Carême, Imp..• Les opinions s'élèvent peu à peu jusqu'au comble de la probabilité, PASC. Prov. 13.• Elle nous mène jusqu'à la mort qui est un comble éternel, PASC. Vrai bien, 1.• C'était là le comble de ses souhaits, LA BRUY. VI.• Les vieux capitaines dont la réputation et l'expérience étaient au comble, FÉN. Télém. XV.• Encore une parole, j'étais au comble du bonheur, FÉN. ib. IX..• L'iniquité vint à son comble, BOSSUET Hist. II, 4.• Les iniquités n'étaient pas au comble où il les attendait, BOSSUET ib. II, 3.• Sa gloire parut alors élevée au comble, BOSSUET Hist. I, 9.• Ses iniquités étaient montées jusqu'au dernier comble, BOSSUET Bonté, 2.• La mesure semble être au comble, BOSSUET Avert. 1.• Ses plaisirs sont au comble, et n'ont rien de mortel, GILB. Le jugement dern..• Le comble à cette vraisemblance était que les marées sont plus hautes à la nouvelle et à la pleine lune, VOLT. Newt. III, 10.Mettre le comble à quelque chose, en combler la mesure.• Pour mettre le comble à leur malheur, FÉN. Tél. XIV.• Pour mettre le comble à sa félicité, HAMILT. Gramm. 7.Pour comble de, pour dernier surcroît.• Et demandons aux dieux, nos dignes souverains, Pour comble de bonheur l'amitié des Romains, CORN. Nicom. V, 10.• Veux-tu qu'un médisant, pour comble à sa misère, L'accuse d'y souffrir l'assassin de son père ?, CORN. Cid, III 1.• Pour comble à sa noire aventure, CORN. Pomp. II, 2.• ....Pour comble d'ennui, Mon coeur, mon lâche coeur s'intéresse pour lui, RAC. Andr. V, 1.• Pour comble de gloire et de magnificence, RAC. Esth. II, 5.• Pour comble de malheur, les dieux, toutes les nuits, Me venaient reprocher ma pitié sacrilége, RAC. Iphig. I, 1.• La fortune pour comble de maux me l'a enlevé, FÉN. Tél. IV.Absolument.• Mais, pour comble, à la fin, le marquis en prison Sous le faix des procès vit tomber sa maison, BOILEAU Sat. V.XVe s.• Quiconque amenera poissons en panier à Paris, il convient que ses paniers soient emplis loyaument, ou à comble ou sans comble, Ord. des rois de Fr. t. II, p. 359.• On ne trouveroit nul homme terrier à qui nostre seigneur donnast tant de graces comme il te appreste : il te donna beaulté à comble ; il te donna sens et discretion à congnoistre le bien du mal, Lancelot du lac, t. III, f° 78.XVIe s.• Comment nous oserions nous glorifier d'avoir adjousté quelque comble à la juste mesure, CALV. Instit. 614.• Sa libéralité vient jusques à ce comble, de ne rejetter pas nostre obeissance imparfaite, CALV. ib. 259.• Ce que dessus suffira pour faire conoistre que l'injustice aproche de son comble, LANOUE 13.• Droit de mouture est que les meuniers doivent rendre du rès [mesure de grain rase] le comble [mesure de farine comble], LOYSEL 262.Provenç. comol ; espagn. et ital. colmo ; portug. cumulo, et cómoro, combro, tas de terre ; du latin cumulus.SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE1. COMBLE. - HIST. Ajoutez : XIIe s.• En laqueile conissance [des bienheureux] croist li combles del reguerredon, li Dialoge Gregoire lo pape, 1876, p. 238.————————comble 2.(kon-bl') adj.1° Qui est rempli jusque par-dessus le bord. Boisseau comble.Fig. La mesure est comble, c'est-à-dire les choses sont arrivées à ce point qu'on ne peut plus les endurer.• Voyant enfin la mesure comble, BOSSUET I, Pass. 3.• Les temps étaient changés, la mesure était comble, VOLT. Moeurs, 128.Par extension. La salle de spectacle était comble, elle était pleine à ne pouvoir contenir personne de plus.2° Terme de vétérinaire. Pied comble, nom donné au sabot dont la sole porte seule à l'appui, dépassant, par cette convexité morbide, le bord plantaire de la muraille.XIIe s.• Estre comble, Roncisv. p. 8.XIIIe s.• De joie fu sa fame pleine, Quant el vit son seignor venir, Les pocins à son col tenir ; Por comble se tient et por riche, Ren. 17785.XIVe s.• Et regardez si le cheval a piés gras et combles, Ménagier, II, 3.XVe s.• Princes, ceulx des citez sont grans, Bien aisiez, riches, combles, frans, Et de jour en jour s'enrichissent, E. DESCH. Poésies mss. f° 448, dans LACURNE.• Ta grand richesse et tes combles tresors sont bien vains, LOUIS XI Nouv. C..XVIe s.• L'amitié en seroit plus pleine et plus comble, MONT. I, 210.• Il en a sa brassée toute comble, il n'en peult saisir davantage, MONT. I, 350.• Quand tous mes cinq sens de nature seroient combles de liesse...., MONT. II, 252.• Lesquels il fit encore couvrir de terre, jusqu'à ce que la fosse fust comble, DESPER. Cont. XV.Comble 1 ; provenç. comol ; ital. colmo.————————comble 3.(kon-bl') s. m.1° Construction couronnant le sommet d'un édifice.• Du temple tout à coup les combles s'entr'ouvrirent, VOLT. Oedipe, IV, 1.• Il n'est guère plus vain d'avoir paru à la tranchée que le couvreur d'avoir monté sur de hauts combles, LA BRUY. II.• L'aigle déjà perché sur le comble des tours semblait dire : Ici je bâtirai mon aire, CHATEAUB. Gaul, 264.• Apprends à monter sur un comble, J. J. ROUSS. Ém. III.• L'homme est tombé en ruine par sa volonté dépravée, le comble s'est abattu sur les murailles, et les murailles sur le fondement, BOSSUET la Vallière..Terme d'architecture. Comble brisé, celui qui est disposé sur deux pentes, l'une inférieure fort roide, l'autre plus douce.Terme de vannier. Intervalle entre les têtes d'un ouvrage.Terme de blason. Le chef de l'écu lorsqu'il est diminué.2° De fond en comble, loc. adv. Entièrement.• La ville fut renversée de fond en comble, BOSSUET Hist. II, 8.• Cette conduite de Gervaise n'allait pas à moins qu'à la chute d'un si merveilleux édifice [la Trappe] ; M. de la Trappe le sentait, lui qui l'avait construit et soutenu de fond en comble, SAINT-SIMON 61, 22.Ruiner quelqu'un de fond en comble. Ruiner un système, une doctrine, de fond en comble.3° Fig. Monter au comble, s'élever au plus haut point.• Le mérite en repos s'endort dans la paresse ; Mais par les envieux un génie excité Au comble de son art est mille fois monté, BOILEAU Ép. VII.• Qu'ils n'arrivent jamais au comble frivole de notre gloire, plutôt que de l'acheter au prix des vices et des malheurs où elle nous a précipités, MASS. Louis le Grand..• Il est au comble de ses voeux, RAC. Andr. V, 2.• Quand je vous élevais au comble de la gloire, RAC. Mithr. IV, 4.• Au comble des douleurs tu m'as fait parvenir, RAC. Andr. V, 5.De même que comble 1, qui vient de cumulus, et comble 3, qui vient de culmen, ont influé l'un sur l'autre pour s'assimiler dans la forme, de même on trouverait dans les emplois figurés de comble 1 des exemples qui iraient aussi bien à comble 3 ; mais il a paru qu'il valait mieux laisser ensemble des locutions si voisines plutôt que de les disséminer, en suivant rigoureusement un principe étymologique. D'ailleurs on peut conserver dans l'esprit cette nuance-ci : quand on dit qu'un homme ou un être personnifié arrive au comble de..., on doit entendre qu'il s'agit du faîte ; quand on dit qu'une chose est à son comble, arrive à son comble, on doit entendre qu'il s'agit du surcroît que comporte une mesure.XIIIe s.• Et avoit un trau el comble deseure, par quoi il reprendoit s'alaine, Chr. de Rains, p. 95.XIVe s.• Une litiere fist tantost aporter là, Et dessus la litiere, sus le comble, rouva à metre sa baniere, si que on la verra, Baud. de Seb. IX, 406.XVe s.• Ces engins jetoient nuit et jour pierres et mangonneaux à grand foison, qui enfondroient et abattoient les combles des tours, des chambres, des salles, FROISS. I, I, 115.• Messire Guillaume de Douglas, qui s'arme d'azur à comble d'argent, et dedans le comble trois estoiles de gueules, FROISS. I, I, 168.• Si tost que la nef fut approchée des deux basteaulx, ung chevalier se mist au comble [tillac] de la nef, Perceforest, t. VI, p. 46.• Carleir frappa premierement le roy en la lumiere du heaulme et lui abattit jus du chief ; le roy le va atteindre sur le comble de l'escu, ib. t. I, p. 25.XVIe s.• Ce temple fut reedifié par Vespasien de fond en comble, AMYOT Public. 28.• La couverture est un seul comble rond, AMYOT Péricl. 29.• L'office du censeur, qui estoit à Rome la cyme de dignité, et le comble d'honneur le plus hault où pouvoit atteindre un citoyen, AMYOT Caton, 32.• Tout l'exercite en armes luy dressa un comble de terre en forme de tombeau, AMYOT Alex. 94.• Lorsque le peuple athenien estoit au comble de sa prosperité, AMYOT Péricl. et Fab. comp. 1.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.